OBJECTIF GRAND SUD

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Saison 4 - La Plume, chapitre 1

March 12, 2018 by Objectif Grand Sud

Juste un petit trait de plume pour accompagner les images.
Les points GPS du Garmin d’Alain ont tissé un fil visible tout au long du voyage et
ses commentaires donnaient des nouvelles presque tous les jours. Les chroniques
de Francis ont décrit le périple, ses escales, les rencontres, la vie à bord, ses ateliers
et le spectacle souvent qualifié de grandiose. Les mails par satellite gardaient un lien
plus personnalisé, encourageant souvent, plus intime aussi parfois pour les proches.
Nous avons tous pris des photos, chacun selon son angle de vue, son propre regard,
son instant choisi.
Alors que dire de plus ?

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Cette première série de photos montre à peine la fascination qui a été la nôtre.
Si l’Antarctique se laisse décrire, raconter, il se vit surtout et s’éprouve.
Si nous avons été attirés, tous et chacun, c’est en partie grâce aux écrits des anciens
navigateurs et explorateurs qui ont osé affronter l’inconnu, le grand froid, les vents
furieux, les mers déchainées, les trains de glaces. Ces audacieux découvreurs ont
décrit leurs mains glacées, leurs restrictions de nourriture, leurs frayeurs en continu
mais aussi leur jubilation à être là, au cœur d’un monde hallucinant, à répertorier les
fonds, les sommets, les courants et les espèces vivants dans un milieu a priori
hostile.

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Nous aussi avons à cœur de raconter et de partager des images.
La magie opère depuis longtemps mais à la sortie du Drake, ce fameux passage de
cinq cents milles qu’il faut traverser pour arriver « là-bas », un premier iceberg se
donne à voir. Un tabulaire, gros comme un immense cargo, encore un peu indistinct
dans les camaïeux de gris-bleu, entre ciel et mer à l’horizon du Sud.
Puis, c’est la première escale. Nous y sommes ! Le continent austral s’ouvre par les
Shetlands du Sud. Dans la base de Media Luna, nous serons spontanément invités à
partager un bon petit café et à écouter comment vivent ces hommes de l’Armada
argentine du bout du monde. Les manchots papous sont là dans leur rockerie et on
se croirait au cœur de l’Ile Noire, dessinée par Hergé. Ils sautent à pieds joints sur
des cailloux mouillés et glissent et se récupèrent bien vite en se dandinant. Nous
sommes aussi amusés et attendris de les comparer à nos petits enfants.

Les phoques, sont là aussi, lascivement endormis, ouvrant juste un œil à notre approche.
Ces « grosses limaces » nous impressionnent dès qu’elles amorcent un
déplacement ponctué par un vrai temps de récupération. Nous ne savons pas encore
quelle souplesse sera la leur quand elles s’ébroueront dans l’eau fraiche.
L’île Deception fut une étape de plusieurs jours. Une main géante de « graffeur »
urbain aurait dessiné des arabesques et laissé en névé sa signature blanche sur des
murs noirs de lave. Oui, c’est un volcan qui ouvre ses portes par de hautes roches
sombres qu’on appelle les chaudrons de Neptune. Sinistre.
Le soleil du lendemain balaie cette impression en ouvrant toutes grandes ses
fenêtres vers un horizon baigné de bleu. Et nous grimpons gaillardement pour voir
d’en haut la petite Cardinale nichée au cœur d’un lac miroir ourlé d’un trait de crayon
au fusain… Que dire…? C’est beau…


Descendre vers le Sud, et atteindre Enterprise, un mouillage insolite contre une épave de cargo rouillée. Seule son étrave sort de l’eau et la neige qui tourbillonne en pluie de cristal nous laisse découvrir une aquarelle grandeur nature. Le lieu est sûr et nous y serons bien, à couple d’un autre voilier.
Toujours plus Sud, nous quittons la baie d’Enterprise au lever du soleil et croisons la
route de quelques baleines. Là, si notre regard est doux et humble pour ce grand cétacé, nous serons émus de constater que nous avons failli troubler son sommeil.
En effet, son dos long et arrondi flottait à la surface. Elle plonge furtivement et son
sillage nous fait évoquer une époque où l’homme n’était pour elle qu’un prédateur
monstrueux. D’autres baleines ondulent majestueusement autour du bateau et nous
sommes heureux d’être solamente, ces spectateurs-là.

 

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Dans une parfaite chorégraphie, des petits pinguinos bondissent et caracolent sur l’onde métallique.
Plus bas, le canal de Neumayer est bordé de hautes falaises glacées qui semblent
avoir été arrachées, tranchées net. Même blanche et gigantesque, la paroi griffée
laisse une impression de cicatrice. Et le vent nous attend au tournant et donne un
vigoureux coup de balai devant notre route, non pour la dégager mais au contraire
pour dresser un tapis de glaces et de growlers. La Cardinale se cabre un peu mais
passe pilotée par un habile barreur et par tous les yeux solidaires et nous arrivons à
Port-Lockroy. C’est une base anglaise construite en 1944. Avec ses comptoirs, son
musée, son passage à niveau réservé aux manchots et son coup de vent
accompagné de rafales frisant les 50 nœuds, la Cardinale est chahutée. Pas quiet
l’équipage même si le Pitaine confirme que son ancre tient. Ça souffle, ça siffle, ça
hurle. On débranche l’éolienne qui s’emballe. On repousse les growlers déchainés
qui déboulent sur nous.

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On dormira peu ou mal… Ce temps était prévu et c’est pour cela qu’on s’est mis à
l’abri. Il y eut un soir, il y eut un matin qui ressemblait au soir qui ressemblait au
matin. Mais, malgré la tourmente un très grand plaisir à récupérer le sac d’Alain… Et
son jambon promis.


Fin du premier chapitre (retrouvez toutes les photos dans la galerie).

La Plum’ qui vous embrasse.
 

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