Saison 4 - La Plume, chapitre 2

Le jeu des lumières, la joie des lumières!


Le soleil vient illuminer la crête en face de nous. Les rayons s'étirent et les crêtes caressées au pinceau se dévoilent. Tiens, c'est rose ici?  Un pan de montagne en tapis rose et vert là-haut…

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Ce sont les diatomées, petites fées clochettes roses de phytoplancton qui s'étalent voluptueusement au soleil. Notre regard gourmand verrait plutôt un vacherin, un parfait, un Sabayon, ou mieux encore un Pavlova… Vanille, framboise, meringue.

La Cardinale s'approche doucement de Port Charcot, et de la Salpêtrière, lieu envoûtant qui lève un voile de brume sur le cimetière des icebergs.

On retient l'instant comme on retient son souffle, pour partager la beauté épurée qui se donne à voir. Les images sont hallucinantes, balayées par un regard qui ne sait plus où donner des yeux. Réduire l'immensité de ce panorama polaire dans l'écran tout petit de son appareil photo n'est finalement pas si dérisoire puisque Ami Lecteur, tu le regardes aussi.

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Et c'est ainsi, que nous arrivons à Pléneau, ce lieu magique qui porte le nom d'un talentueux photographe de l'expédition Charcot. Là, Benny a trouvé un abri dans un chenal entre deux îles, à deux coups d'aviron du bord. La recherche d'un mouillage sûr et tranquille ne se fait pas sans une grande attention. Les croquis sont dessinés à la main et méritent d'être un peu interprétés avec précaution. Ce qui mobolise chacun de nous. Le lendemain, nous irons crapahuter, grimper encordés pour certains et prendre de la hauteur. Les skuas n'apprécient pas et fondent sur nous comme des furieux.

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Les otaries batifolent, se cherchent et se griffent en un semblant de jeu amoureux qui se prolonge par un bain qui semble délectable. L'une d'elle s'offre en spectacle en tournoyant sur elle-même comme un tonneau libre. On dirait même qu'elle s'applaudit de temps en temps!

Au loin, devant le Mont Français, (2760m dans l'île Anvers), 

il y a ce soir une invitation à un vernissage et l'exposition proposée sera grandeur nature. Des œuvres de grand art, d'immenses sculptures de glaces, des figures en arabesques se mirant dans une eau limpide et calme. Des arches d'un bleu qui ferait pâlir d'envie les turquoises les plus lumineuses. Un cocktail est prévu qui retient le coucher du soleil. Ce soir, pas de brume, le regard circule librement dans toutes les allées, dans toutes les directions. Les pinguinos, en habit de soirée s'approchent en familiers du lieu. Ils sont chez eux, à la recherche d'un petit canapé à déguster et dodelinent du bec quand ils le trouvent. Nous en ferons autant en portant un toast à la magnifique expédition réalisée.

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Nous continuons à descendre vers le Sud et nous retenons à peine la vraie joie mêlée d’espièglerie quand nous atteignons la latitude 65°14S de Vernadsky. 
L'ultime Sud pour la Cardinale. Une station ukrainienne, une base scientifique de recherche où nous nous poserons quelques jours. 

Le temps de découvrir les montagnes, les anciennes habitations des scientifiques, leur mode de vie rustique et néanmoins communautaire. Le temps de filmer des Papous et quelques rares jugulaires ou manchots Adélie, et aussi de sublimes phoques de Weddell au pelage blond irisé. Nous serons invités à venir chanter et découvrir la Vodka locale, locale? 

"Boud'Mâ !" Se lance-t-on en trinquant joyeusement et en partageant aussi notre Armagnac Ravignan, lequel a immédiatement conquis les papilles ukrainiennes!

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Nous offrons des gâteaux, cuisinés à bord de La Cardinale et de Petrouchka (bateau
français ami, à couple de nous). Une fusée est tenue fièrement par Julien qui a dix ans, le plus jeune navigateur (sur Petrouchka avec ses parents) pour fêter les 22 ans de la station. Les guitares de Bogdan, scientifique de la station et de Francis donnent de leurs cordes, ainsi que le yukulélé de Julien. Les marins et les chercheurs chantent ensemble, et le bar restera animé, joyeux et enthousiaste jusqu'au bord de la nuit.

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Notre Cook musicien reçoit de nos hôtes un magnifique tee-shirt pour son anniversaire fêté ce jour-là à Vernadsky. Cette escale méritait bien une mention spéciale tant la chaleur de l'accueil nous a tous conquis.
C'est aussi l'ultime Sud pour la Cardinale et son équipage. Un spleen vient s'immiscer dans l'humeur de certains. Enfin, surtout la mienne. Nous avons atteint la dernière base et le programme est réalisé. Plus bas, il y avait Adélaïde, une terre qui porte de nom de notre petite-fille… C'est à 150 milles et les vents et les glaces risquaient fort de nous enfermer et de nous retenir en cette fin d'été austral.

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D'autres équipiers au contraire, envisagent le retour avec plaisir. Et le ballet des longues aussières à larguer commence. Les skuas piaillent et tournoient, prêts pour un piqué ciblé sur les bonnets, La Cardinale sort de sa torpeur balancée et passe toute fière devant les phoques qui ouvrent un œil rond et le referment aussitôt. Il faut suivre une route tracée à l'aller entre les icebergs et les growlers. Pour sortir de la baie, il a fallu emprunter le labyrinthe glacé et éviter ses fausses pistes. Encore un enchantement pour les yeux mais l'attention de tous est requise pour traverser ce village fantôme, blanc de glaces, vert d'eau et bruissant quand la vague s'engouffre et se retire des tunnels creusés par les flux des vagues. Adieu Vernadsky.

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La Plum' qui vous embrasse.